Sophie Bressé
Isabelle Puech
Contexte
Cette étude croisée sur les particuliers-employeurs en perte d’autonomie et leurs salariés mobilise les résultats issus de l’exploitation des bases de données de l’ACOSS et de la DREES. Elle a été financée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et par la Direction générale de la cohésion sociale, dans le cadre d’une convention de partenariat signée en 2009 avec la FEPEM.
Cette convention s’inscrit dans le cadre d’un engagement commun, porté par la FEPEM, la CNSA et la DGCS, d’accompagnement personnalisé des particuliers-employeurs en perte d’autonomie et de professionnalisation des assistants de vie.
Les résultats de l’étude en quelques chiffres
Un particulier-employeur âgé sur trois est en situation de fragilité
- Au quatrième trimestre 2010, 1,1 million de particuliers-employeurs âgés de 60 ans et plus ont rémunéré 82 millions d’heures et versé 735 millions d’euros de masse salariale nette.
- 368 000 particuliers-employeurs âgés sont en situation de dépendance.
- Parmi eux, 223 000 ont une fragilité reconnue via une exonération et 680 000 bénéficient de l’exonération de charges patronales « plus de 70 ans ». L’étude montre qu’une part importante de particuliers-employeurs en perte d’autonomie ne relève pas du dispositif APA.
63% des intervenantes au domicile de personnes fragilisées sont salariées d’un particulier-employeur
- Sur les 515 000 professionnelles qui interviennent au domicile de personnes fragilisées, près des deux tiers sont salariées d’un particulier-employeur, de façon exclusive ou en cumulant avec un autre mode d’intervention (prestataire par exemple).
- 59% des intervenantes en emploi direct sont amenées à aider des personnes atteintes de détérioration physique, 35% peuvent être amenées à travailler auprès de personnes atteintes de détérioration intellectuelle/mentale et près de 25% déclarent aider des personnes en fin de vie.
- Arrivées tardivement dans ce secteur, souvent après des périodes d’inactivité, de chômage, de petits boulots, les salariées en emploi direct ne souhaitent pas le quitter : les trois quarts envisagent de faire ce métier jusqu’à l’âge de la retraite.
LES PROPOSITIONS POLITIQUES DE LA FEPEM SUR LA RÉFORME DE LA DEPENDANCE
- Mettre en place une juste gouvernance des instances de pilotage de la dépendance
- Harmoniser les dispositifs de financement sur l’ensemble du territoire, reposant sur un premier socle de solidarité publique
- Rénover le modèle mandataire
- Rechercher l’équité de traitement entre les différents modes d’intervention
- Valoriser le statut des aidants familiaux
- Mobiliser des instruments juridiques, des outils du patrimoine et de financement, pour anticiper et sécuriser le risque lié à la perte d’autonomie
- Renforcer l’accompagnement personnalisé des métiers d’assistants de vie auprès des particuliers-employeurs en perte d’autonomie
Introduction
Alors qu’en 2005, un habitant en France métropolitaine sur quatre était âgé de 60 ans ou plus, en 2060, un habitant sur trois appartiendra à cette tranche d’âge1Nathalie Blanpain, Olivier Chardon, « Projections de population à l’horizon 2060. Un tiers de la population âgé de plus de 60 ans », Insee Première, n° 1320, INSEE, octobre 2010.. Plus nombreuses, les personnes âgées vivront aussi plus longtemps, ce qui laisse augurer une augmentation du nombre de personnes âgées souffrant d’incapacités et ayant besoin d’être accompagnées dans leur perte d’autonomie.
Aujourd’hui, parmi les 60 ans et plus vivant à domicile, la DREES (Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques) évalue à 673 000 le nombre de personnes dépendantes (la dépendance est entendue ici à travers une approche large qui lie limitations fonctionnelles et restrictions d’activité) auxquelles s’ajoutent 2 061 000 personnes dont l’autonomie est « modérée » (difficultés motrices, cognitives, difficultés pour réaliser certaines tâches de la vie courante, mais pas de restriction absolue dans les activités essentielles du quotidien)2Séverine Dos Santos, Yara Makdessi, « Une approche de l’autonomie chez les adultes et les personnes âgées. Premiers résultats de l’enquête Handicap-Santé 2008 », Études et Résultats, n° 715, DREES, février 2010..
Les recherches et études menées sur l’accompagnement à domicile des personnes dépendantes sont rarement pensées à travers le prisme des personnes en perte d’autonomie, la question centrale de la qualité du service étant la plupart du temps appréhendée à travers la qualité des emplois des intervenantes à domicile, en particulier celles intervenant pour le compte de structures associatives qui représentent « l’emblème historique » de ces emplois. L’accompagnement au domicile des personnes dépendantes s’est en effet construit sur le socle de la branche de l’aide à domicile, structurée dans une logique d’Etat-providence autour du monde associatif. Parallèlement, en France, depuis deux décennies, les pouvoirs publics ont encouragé le développement de l’emploi direct qui permet à un particulier d’employer un salarié pour l’aider à son domicile, directement, ou par l’intermédiaire d’une structure mandataire3Les services à domicile peuvent être délivrés selon trois modes d’intervention : l’emploi direct où le particulier gère lui-même l’ensemble de la relation d’emploi (du recrutement à la séparation) ; le mandat dans le cadre duquel le particulier conclut un contrat de mandat avec une structure mandataire qui l’aide à trouver et recruter un salarié et à gérer les tâches administratives inhérentes à la relation d’emploi ; le mode prestataire dans le cadre duquel la structure prestataire est l’employeur du salarié qui fournit une prestation au particulier. En emploi direct et en mode mandataire, le particulier est juridiquement l’employeur du salarié qui intervient à son domicile, d’où son statut de particulier-employeur..
La légitimité de l’emploi direct dans le champ de l’accompagnement à domicile des personnes dépendantes fait débat, en grande partie parce que l’emploi direct renvoie à une autre branche professionnelle que celle de l’aide à domicile : celle des salariés du particulier-employeur.
Il y a, en France, une opposition idéologique forte face au développement de l’emploi direct sur le champ de l’accompagnement à domicile des personnes dépendantes : perçus souvent comme de « simples femmes de ménage », les salariés en emploi direct sont exclus de fait du débat public sur la professionnalisation des emplois d’aide à la personne ; les particuliers-employeurs, quant à eux, sont généralement associés à un groupe homogène d’employeurs aux revenus substantiels qui s’offriraient le luxe d’un « service de confort » alors qu’ils ne sont pas touchés par un problème de dépendance. Dans les faits, les particuliers-employeurs constituent une population très hétérogène composée de parents employeurs qui font appel à une assistante maternelle ou à une garde d’enfant à domicile, de couples bi-actifs qui emploient une femme de ménage, mais aussi de personnes dépendantes qui recourent à une aide professionnelle pour les accompagner dans leur vie quotidienne.
L’ACOSS (Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale) dénombre, au quatrième trimestre 2010, 170 900 particuliers-employeurs bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Autrement dit, le quart des bénéficiaires de l’APA à domicile emploient eux-mêmes un ou plusieurs salarié(s). En outre, une part difficilement quantifiable de personnes âgées en perte d’autonomie ne relèvent pas, par choix, du dispositif APA et sont susceptibles d’employer directement à leur domicile un professionnel. Enfin, la majorité des particuliers-employeurs est âgée de 60 ans et plus4Matthieu Angotti, « Emploi familial : le vécu des particuliers-employeurs », Consommation et Modes de vie, n° 213, CREDOC, août 2008.. Dans la mesure où la perte d’autonomie est un processus progressif, il est probable que ces particuliers-employeurs âgés soient déjà ou soient amenés à devenir des particuliers-employeurs en perte d’autonomie5Observatoire FEPEM, Rapport de branche Salariés du particulier-employeur – 2009, FEPEM, avril 2011..
Dans le cadre de la réflexion nationale sur la prise en charge de la dépendance qui s’est engagée début 2011, de nombreux avis et propositions ont été exprimés par les différents acteurs du champ. Certains d’entre eux portent l’idée selon laquelle l’emploi direct et un accompagnement de qualité de la perte d’autonomie seraient inconciliables.
La FEPEM propose une autre voie, fondée notamment sur la rénovation du modèle mandataire, la valorisation du statut des aidants familiaux, la mobilisation d’instruments juridiques et la mise en place d’une politique de ressources humaines et de professionnalisation ambitieuse. Pour construire son programme de propositions6FEPEM, La réforme de la dépendance. Une opportunité sociétale et économique. Propositions contributives de la FEPEM, juin 2011., la FEPEM s’est notamment appuyée sur son Observatoire qui, dans une démarche scientifique, pilote un vaste programme d’études quantitatives et qualitatives sur les emplois de la famille.
L’étude qui suit se décline en deux volets, l’un consacré aux particuliers-employeurs en perte d’autonomie, l’autre aux salariés qui interviennent au domicile de personnes dépendantes pour les accompagner dans la réalisation des actes essentiels du quotidien. Cette étude s’appuie respectivement sur l’exploitation des bases de données administratives de l’ACOSS sur les particuliers-employeurs, et sur l’enquête « Intervenants au domicile des personnes fragilisées » (dite enquête IAD) réalisée par la DREES en 2008 auprès d’un large échantillon représentatif de salariés qui interviennent au domicile des publics fragiles.
Encadré méthodologique
Depuis mars 2009, la Fepem et l’ACOSS sont liées par une convention de partenariat dans le cadre de laquelle sont produites, à partir des données de l’ACOSS, des études ciblées sur des thématiques permettant à la Fepem de nourrir sa connaissance des particuliers-employeurs et de leurs salariés. Les données exploitées sont issues des bases de données administratives des URSSAF, du Centre national CESU et du Centre Pajemploi. Elles portent sur les volumes horaires rémunérés par les particuliers-employeurs, les masses salariales nettes correspondantes versées, ainsi que sur le type d’exonération dont ils peuvent, pour certains, bénéficier.
1. Les particuliers employeurs âgés
Ce premier volet porte sur les particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus et tente de quantifier et de décrire ceux qui, parmi eux, sont en perte d’autonomie. Il présente une photographie de leurs caractéristiques (notamment leur âge et le type d’exonération dont ils bénéficient ou non), de leurs comportements en termes de volume horaire rémunéré, et enfin des relations d’emploi qu’ils ont nouées avec leurs salariés, notamment quant à leur durée.
Le nombre d’heures rémunérées constitue la variable centrale de l’étude : c’est en effet à travers elle que l’on approche la réponse aux besoins d’accompagnement des particuliers-employeurs (sans ignorer, cependant, que la réponse apportée peut ne couvrir que partiellement les besoins, et que celle identifiée dans les bases exploitées – la réponse apportée par un (ou des) intervenant(s) en emploi direct – peut aussi être couplée à une aide informelle et/ou à une autre aide professionnelle, dispensée par des intervenants issus de structures prestataires). Cette variable, couplée à l’âge des particuliers-employeurs et au type d’exonération dont ils bénéficient ou non, sera utilisée pour estimer leur degré de fragilité.
La démarche consiste d’abord, à travers l’exploitation des données de l’ACOSS, à identifier les 60 ans ou plus dans l’ensemble de la population des particuliers-employeurs. Au 4ème trimestre 2010, l’ACOSS dénombre près de 2 975 000 particuliers-employeurs. Un peu plus de 863 000 d’entre eux emploient une assistante maternelle et environ 87 000 une garde d’enfant à domicile : ces parents-employeurs sont exclus du champ de l’étude. Un peu plus de 2 000 000 de particuliers-employeurs rémunèrent donc un salarié pour une autre activité que la garde d’enfant7Pour être tout à fait exact, ces particuliers-employeurs peuvent employer une baby-sitter de façon plus ou moins occasionnelle, déclarée via un CESU (Chèque Emploi Service Universel) ou une DNS (Déclaration Nominative Simplifiée), une activité assimilable à de la garde d’enfant mais non subventionnée par la PAJE (Prestation d’Accueil du Jeune Enfant).. Parmi ceux-ci, près de 1 137 000, soit 57 % d’entre eux, sont âgés de 60 ans ou plus : ils ont rémunéré, au 4ème trimestre 2010, près de 82 millions d’heures, pour une masse salariale nette d’un peu plus de 735 millions d’euros. C’est sur ces derniers que porte l’étude, et c’est pour ceux-ci que l’on cherchera à mettre en œuvre une méthode permettant d’estimer leur degré de fragilité, de façon à repérer, parmi eux, ceux qui sont en situation de dépendance.
1.1. Une moyenne d’âge de 78 ans
Dans un premier temps, on focalisera l’analyse sur le critère de l’âge. Cette variable est fondamentale pour approcher le phénomène de la dépendance. Même si celle-ci peut survenir à tous les âges de la vie, sa prévalence croît avec l’avancée en âge des individus8L’enquête Handicap-Santé en ménages ordinaires (HSM) menée conjointement par la DREES et l’INSEE en 2008 permet de disposer de données sur la prévalence de la dépendance aux différents âges pour l’ensemble de la population, alors que la plupart des données existantes sur le phénomène portent sur un champ limité.. C’est à partir de 80 ans que la prévalence de la dépendance devient significative : on estime ainsi que près de 14 % des personnes âgées de 80 ans ou plus vivant à domicile sont dépendantes, contre un peu plus de 3 % des 60-79 ans9Dos Santos, Makdessi, op. cit. (graphique 1).
Au 4ème trimestre 2010, l’ACOSS dénombre donc près de 1 137 000 particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus. En moyenne, ces derniers sont âgés de près de 78 ans, et les 80 ans et plus en représentent près de la moitié ; les moins de 70 ans en représentent à peine le quart (graphique 2).
1.2. Un volume d’aide qui croît avec l’âge
Les particuliers-employeurs âgés présentent des profils très différents en termes de nombre d’heures rémunérées, qui correspondent sans doute à des degrés de fragilité variables. Les données de l’ACOSS permettent de connaître le volume horaire rémunéré par chaque particulier-employeur de 60 ans ou plus : en moyenne, ils ont rémunéré 72 heures au quatrième trimestre 2010, soit environ 5,6 heures par semaine. Comme on l’a vu plus haut, c’est ce volume horaire qui nous permet, dans le cadre de cette étude, d’approcher leurs besoins d’accompagnement, ou plus exactement la réponse apportée à ces besoins, et l’évolution de ces besoins à mesure que les particuliers-employeurs avancent en âge.
Le volume horaire moyen rémunéré par les particuliers-employeurs de chaque groupe d’âge quinquennal au quatrième trimestre 2010 traduit parfaitement cette évolution: il reste très stable, proche de 60 heures, pour les groupes d’âge 60-64 ans, 65-69 ans, 70-74 ans et 75-79 ans, puis enregistre une croissance de 15 % pour le groupe d’âge 80-84 ans, avec 68 heures, qui se poursuit de façon exponentielle, respectivement + 25 %, + 31 % et + 44 % pour les groupes d’âge 85-89 ans, 90-94 ans et 95 ans et plus (graphique 3).
1.3. Un particulier-employeur sur cinq bénéfice d’une aide financière
Les données de l’ACOSS permettent également d’identifier le type d’exonération dont les particuliers-employeurs bénéficient ou non, un indicateur qui permet de repérer les publics fragiles.
Sur l’ensemble des particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus, toujours au quatrième trimestre 2010, 15 % sont bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) à domicile et 5 % d’une autre exonération liée à un handicap ou à une invalidité, et peuvent donc être considérés d’office comme des publics fragiles ; 60 % des particuliers-employeurs âgés sont bénéficiaires de l’exonération de charges patronales pour les personnes âgées de 70 ans ou plus. On s’attachera dans la suite de l’étude à repérer parmi eux ceux qui peuvent être considérés comme fragiles.
Enfin, un sur cinq ne bénéficie d’aucune exonération liée à un handicap (tableau 1).
1.4. Les particuliers employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile : des profils variés
Les bénéficiaires de l’APA ne constituent pas une population homogène. Parmi eux, en effet, tous ne présentent pas le même niveau de dépendance. La grille AGGIR, utilisée pour définir leur degré de perte d’autonomie lors de l’entretien qui précède l’attribution de l’allocation, permet de classer les individus en GIR (groupes iso-ressources), le GIR 1 correspondant à une perte d’autonomie très importante et le GIR 6 regroupant les individus considérés autonomes ; l’APA est accessible aux individus à partir du GIR 4 (encadré 1). Le GIR de l’individu est une donnée connue des conseils généraux, en charge de la gestion et de l’attribution de l’APA, mais cette information n’est pas transmise aux URSSAF et n’est donc pas disponible dans les fichiers de l’ACOSS. Pour essayer d’apporter un éclairage le plus pertinent possible sur les profils et les comportements des particuliers-employeurs dépendants, on a mis en oeuvre une méthode permettant d’imputer un GIR aux particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile présents dans les bases de l’ACOSS, sur la base d’éléments recueillis par la DREES auprès des conseils généraux, sur les bénéficiaires de l’APA.
Encadré 1 : La grille AGGIR
La grille AGGIR (Autonomie gérontologie groupes iso-ressources) classe les personnes âgées en six niveaux de perte d’autonomie :
GIR 1 : Les personnes confinées au lit ou au fauteuil ayant perdu leur autonomie mentale, corporelle, locomotrice et sociale, qui nécessitent une présence indispensable et continue d’intervenants.
GIR 2 : Les personnes confinées au lit ou au fauteuil dont les fonctions mentales ne sont pas totalement altérées et qui nécessitent une prise en charge pour la plupart des activités de la vie courante, ou celles dont les fonctions mentales sont altérées mais qui ont conservé leurs capacités motrices.
GIR 3 : Les personnes ayant conservé leur autonomie mentale, partiellement leur autonomie locomotrice, mais qui nécessitent quotidiennement et plusieurs fois par jour des aides pour leur autonomie corporelle.
GIR 4 : Les personnes qui n’assument pas seules leur transfert mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur du logement. Elles doivent être aidées pour la toilette et l’habillage.
GIR 5 et 6 : Les personnes peu ou pas dépendantes.
Pour imputer une caractéristique spécifique d’un individu ou d’un groupe d’individus à un autre, il faut vérifier au préalable que ces deux individus ou groupes d’individus se ressemblent par ailleurs. La variable de l’âge des bénéficiaires de l’APA est disponible dans l’enquête DREES et dans les fichiers de l’ACOSS, et c’est la variable la plus importante pour traiter de la dépendance. En comparant la répartition par âge des bénéficiaires de l’APA à domicile dans leur globalité d’une part, et celle des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile d’autre part, on constate que la répartition par groupe d’âge quinquennal de ces deux populations est quasiment la même (graphique 4). Ce résultat nous encourage à penser que les deux populations peuvent bien être comparées et qu’il est justifié de mettre en œuvre une méthode consistant à imputer le GIR observé sur une population à une population semblable (encadré 2).
L’imputation d’un GIR aux particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile permet ainsi de disposer pour cette population de sous-catégories qui permettent de repérer une gradation de leur niveau de fragilité.
Encadré 2: La méthode d’imputation d’un GIR aux particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile
Les données de l’ACOSS permettent de connaître, pour chaque particulier-employeur bénéficiaire de l’APA, le nombre d’heures rémunérées sur une période donnée, donc de quantifier l’aide reçue. On part du principe que plus les personnes sont dépendantes, plus le volume d’aide reçu est important. Et on sait que le GIR est l’élément déterminant du plan d’aide : plus la dépendance, mesurée par le GIR, est forte, plus celui-ci est ambitieux. Or les plans d’aide consistent principalement à financer des heures d’accompagnement à la réalisation des différents actes de la vie10Guillaume Bailleau, Françoise Trespeux, « Les bénéficiaires de l’aide sociale départementale en 2009 », Études et Résultats, n° 742, DREES, octobre 2010.. On connaît, grâce aux données de la DREES, la répartition des bénéficiaires de l’APA par GIR (voir tableau ci-dessous). Pour imputer un GIR aux particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA, on a procédé comme suit : sachant que parmi les bénéficiaires de l’APA, ceux classés en GIR 1, qui souffrent de dépendance lourde, comptent pour 2 %, et qu’on approche la réponse aux besoins générés par la dépendance par le volume horaire d’aide reçu, on applique, au sein de la population des particuliers-employeurs, le GIR 1 aux 2 % d’entre eux qui ont rémunéré le plus d’heures au 4ème trimestre 2010. On isole ensuite, parmi ceux qui restent, les 19 % qui ont bénéficié du plus grand nombre d’heures, et on leur impute le GIR 2. Et ainsi de suite pour les GIR 3 et 4.
Cette méthode permet l’estimation du niveau de dépendance des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile, variable précieuse car impossible à mobiliser par ailleurs, malgré quelques limites :
- Pour justifier le bien-fondé de la méthode, on compare les répartitions par âge des deux populations : or celle des bénéficiaires de l’APA à domicile est celle de 2007, alors que celle des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA porte sur 2010. Cependant, sur trois ans, la structure par âge a probablement très peu évolué.
- L’estimation du GIR pour les particuliers-employeurs se fait sur le seul volume d’aide rémunéré en emploi direct, mais certains d’entre eux bénéficient peut-être, en sus, d’heures dispensées par des intervenants prestataires, qui ne sont alors pas prises en compte. Dans ce cas, leur volume d’aide global est sous-estimé, ainsi que leur niveau de fragilité, puisque celui-ci est approché via le volume d’aide.
1.5. Un volume horaire qui croît avec le degré de fragilité
On part du principe que les particuliers-employeurs de 60 ans ou plus qui bénéficient d’une autre exonération que l’APA à domicile ou l’exonération pour les personnes âgées de 70 ans ou plus, sont en partie des personnes porteuses d’un handicap qui n’est pas lié à leur âge, ou des personnes qui ont préféré continuer à toucher des allocations type Allocation compensatrice tierce personne, proposée avant l’APA. Dans la mesure où cette catégorie est la moins importante en poids (5 % des particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus) et où elle regroupe certainement des personnes en perte d’autonomie et des personnes handicapées âgées, c’est-à-dire très hétérogènes en termes de profils, on a choisi de ne pas la traiter en tant que telle dans l’analyse qui suit.
Le tableau 2, qui présente les volumes horaires moyens rémunérés par particulier-employeur selon leur catégorie, montre que les différentes exonérations et leurs sous-catégories (les GIR ou les tranches d’âge) correspondent bien à une gradation du degré de fragilité des publics qu’elles ciblent. Les particuliers-employeurs âgés de 60 à 69 ans considérés comme non fragiles (ne bénéficiant donc pas d’exonération particulière) ont rémunéré en moyenne 55 heures au quatrième trimestre 2010 (soit environ 4,3 heures par semaine), volume moyen quasiment identique à celui observé pour les bénéficiaires de l’exonération de charges pour les personnes âgées de 70 ans ou plus, bien que celui-ci aille croissant avec l’âge : 48 heures (soit 3,7 heures par semaine) pour les 70-79 ans, et 60 heures (soit une heure hebdomadaire supplémentaire) pour les 80 ans ou plus.
Enfin, les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA ont rémunéré en moyenne 146 heures sur le quatrième trimestre 2010, soit 11,3 heures par semaine ; mais parmi eux, ceux qui sont classés en GIR 4 (les moins dépendants donc) ont rémunéré 69 heures sur le trimestre (soit 5,3 heures par semaine), ceux qui sont classés en GIR 3 ont payé pour 162 heures sur le trimestre (12,6 heures hebdomadaires), ceux classés en GIR 2 pour 293 heures (22,7 heures hebdomadaires) et ceux classés en GIR 1 pour 801 heures (62 heures par semaine).
Deux constats posent ici question. Si on se réfère à la grille AGGIR, les personnes classées en GIR 4 sont celles qui n’assument pas seules leur transfert mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur du logement, et qui doivent être aidées pour la toilette et l’habillage. Or l’accompagnement qui leur est proposé, partiellement ou en totalité financé par l’APA à domicile, se traduit par un volume hebdomadaire d’aide moyen de 5,3 heures par semaine, qui semble dérisoire au regard des difficultés qui viennent d’être citées. Comment ce volume peut-il suffire à la prise en charge de la perte d’autonomie de ces personnes ? Ce constat pointe sans doute, en arrière-plan, le rôle indispensable des aidants informels. D’après les données issues de l’enquête HSA menée par la DREES en 2008 auprès d’aidants informels, on peut estimer que 4,3 millions d’aidants informels apportent une aide régulière et non professionnelle à au moins une personne de 60 ans ou plus de leur entourage. Une large majorité d’entre eux sont des membres de la famille. La moitié vit avec la personne aidée.
La seconde interrogation porte sur la proximité entre le volume horaire d’aide moyen dont bénéficient les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA classés en GIR 4 (69 heures au quatrième trimestre 2010), et celui des bénéficiaires de l’exonération de charges pour les personnes âgées de 70 ans et plus de la tranche d’âge « 80 ans ou plus » (60 heures sur la même période) ; ramenés sur une semaine, ces volumes d’heures varient d’environ une demi-heure, soit une différence pour le moins faible.
Mais ces chiffres sont des moyennes qui, on le sait, ne sont pas assez précises pour permettre une interprétation pertinente des situations dont elles rendent compte, et d’autant moins si ces situations présentent une dispersion importante. Il est nécessaire, pour en comprendre le sens, de connaître le degré de disparité entre ces situations, en comparant par exemple les volumes horaires moyens d’aide rémunérés par groupe d’âge pour les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA classés en GIR 4 d’une part, et pour les bénéficiaires de l’exonération de charges âgés de 70 ans ou plus d’autre part.
1.6. Une certaine proximité entre les profils des bénéficiaires de l’APA et les particuliers-employeurs âgés de 80 ans ou plus…
Les différents groupes d’âge pèsent très différemment au sein de la catégorie des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile classés en GIR 4 : les 60-64 ans en représentent à peine 2 % quand les 80-84 ans comptent pour 25,3 % d’entre eux, et les 85-89 ans pour 27 %. En revanche, les volumes horaires moyens sont très homogènes entre les groupes d’âge, oscillant entre 66,4 heures trimestrielles pour les 60-64 ans et 71,2 heures pour les 100 ans ou plus, ce qui, à l’échelle de la semaine, fait varier le volume horaire d’aide moyen de 5,1 à 5,5 heures (tableau 3).
Parmi les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’exonération de charges sociales pour les personnes âgées de 70 ans ou plus, le poids des différents groupes d’âge est en revanche un peu plus homogène : les 70-74 ans comptent pour 17 % et les 75-79 ans, les 80-84 ans et les 85-89 ans représentent chacun environ un quart. Pour les particuliers-employeurs de ces tranches d’âge, le volume horaire d’aide moyen par trimestre est moins homogène que celui observé pour les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA classés en GIR 4 des différents groupes d’âge, mais la dispersion du volume d’aide observé reste relativement faible : un peu plus de 47 heures au quatrième trimestre 2010 pour les moins de 80 ans, 52 heures pour les 80-84 ans et 61 heures pour les 85-89 ans. C’est-à-dire un écart d’une heure entre le volume hebdomadaire le plus faible et le plus élevé. En revanche, pour les bénéficiaires des groupes d’âge suivants dont le poids est plus faible mais qui comptent à eux tous pour près de 64 000 personnes, les volumes d’aide sont très nettement supérieurs, avec 76,6 heures trimestrielles pour les 90-94 ans, 100,6 heures pour les 95-99 ans, et 129,2 heures pour les 100 ans ou plus, soit respectivement 5,9 heures, 7,8 heures et 10 heures hebdomadaires (tableau 4). Ces niveaux moyens traduisent la progression de la perte d’autonomie aux grands âges et les besoins d’accompagnement qu’elle génère. Ils se situent globalement à mi-chemin entre le niveau du volume d’aide moyen dont bénéficient les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA classés en GIR 4 (69 heures sur le trimestre) et celui dont bénéficient ceux classés en GIR 3 (162 heures sur la même période).
On constate qu’une part non négligeable des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’exonération de charges patronales pour les 70 ans et plus présente des profils de consommation d’heures d’accompagnement comparables à ceux des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile. Parmi les premiers, 145 000, soit 21 % d’entre eux, sont dans ce cas, avec environ 92 700 personnes assimilables à des allocataires classés en GIR 4, environ 29 600 assimilables à des allocataires classés en GIR 3, 19 600 assimilables à des allocataires classés en GIR 2 et 3 100 à des individus classés en GIR 111 Pour faire ce constat, on reprend l’association volume horaire/GIR qui a servi pour l’imputation des GIR aux particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA : on considère que ceux dont le volume horaire rémunéré sur le trimestre observé est compris entre les volumes horaires seuils retenus pour effectuer l’imputation des GIR pourraient potentiellement être éligibles à l’APA et classés dans ces GIR..
1.7. …qui pourrait traduire un non recours à l’APA
Bien sûr, on ne peut conclure de manière claire que les particuliers-employeurs âgés bénéficiaires de l’exonération de charges patronales qui rémunèrent ces volumes horaires sont potentiellement éligibles à l’APA à domicile, mais on peut raisonnablement en faire l’hypothèse, et supposer que ces derniers sont en situation de non-recours à l’allocation. L’une des explications qu’il est possible d’avancer est le niveau de revenu de ces personnes, donnée dont nous ne disposons pas dans les bases de l’ACOSS. Cependant, les règles d’attribution de l’APA sont connues et, si l’allocation n’est pas soumise à conditions de ressources, le montant de la subvention accordée est lui, en revanche, tout à fait corrélé au niveau de ressources des allocataires (encadré 3).
Prenons un exemple : en GIR 4, le plan d’aide s’élève en moyenne à 348 euros12« Enquête trimestrielle menée par la DREES auprès des conseils généraux sur l’Allocation personnalisée d’autonomie, Statistiques au 4ème trimestre 2010 », APA Résultats de l’enquête trimestrielle, DREES, mars 2011.. Pour les personnes dont les ressources mensuelles dépassent 2 831 euros, le ticket modérateur atteint 90 % du plan d’aide, ce qui laisse en moyenne 317 euros à la charge du bénéficiaire, pour une participation de 35 euros du conseil général.
On peut donc imaginer qu’un particulier-employeur de 70 ans ou plus potentiellement éligible au GIR 4 de l’APA, et dont les revenus se situent au niveau ou au-dessus de ce seuil, renonce assez facilement à la subvention du conseil général (et à l’ensemble des formalités administratives qui l’accompagnent).
Ainsi, parmi les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’exonération de charges patronales pour les personnes âgées, 145 000 pourraient légitimement être considérés comme des publics fragiles. Si on les inclut dans la catégorie « publics fragiles », aux côtés des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA à domicile ou d’une autre exonération en lien avec un handicap, c’est alors le tiers des particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus qui peut être considéré comme tel.
En outre, la perte d’autonomie étant un processus le plus souvent progressif, une part d’entre eux plus difficile à quantifier, mais sans doute bien réelle, correspond probablement à une sorte de catégorie intermédiaire entre les bénéficiaires de l’APA classés en GIR 4, et les personnes considérées comme autonomes, composée de particuliers-employeurs susceptibles de basculer assez rapidement d’une catégorie à l’autre.
Encadré 3 : L’APA à domicile
Les personnes âgées de 60 ans ou plus en situation de dépendance (GIR 1 à 4) peuvent principalement bénéficier de l’Allocation personnalisée à l’autonomie (APA), qui couvre, selon leur niveau de ressources, une part de leurs dépenses pour être accompagnées à leur domicile ou pour aménager celui-ci en fonction de leurs difficultés (APA à domicile), ou le cas échéant contribue à couvrir leurs frais d’hébergement en établissement (APA établissement). Le plan d’aide mis en place suite à l’évaluation du degré de dépendance de la personne âgée pour rendre possible son maintien à domicile, équivaut à un montant qui peut être dévolu, en partie ou complètement, à des heures d’aide à domicile et/ou à la mise en place d’aides techniques. En moyenne, 90 % des dépenses d’APA à domicile sont mobilisées pour financer le recours à un aidant professionnel. Le nombre d’heures d’accompagnement attribué dépend du degré de dépendance du bénéficiaire, mais la part de ces heures financée par l’APA dépend de son niveau de ressources. Pour un niveau de ressources inférieur à 710 euros mensuels, la participation financière du bénéficiaire de l’APA au financement ; elle augmente ensuite progressivement de 0 % à 90 % du montant du plan d’aide quand les revenus mensuels sont compris entre 0,67 fois le montant de la majoration pour tierce personne (710 euros) et 2,67 fois le montant de la majoration pour tierce personne (2 831 euros). Au-delà de ce seuil, 90 % du montant du plan d’aide est à la charge du bénéficiaire. Le montant du plan d’aide qui demeure à la charge du bénéficiaire (et qui dépend donc de son niveau de ressources) est désigné sous le terme de ticket modérateur. Les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA reçoivent une subvention du conseil général en lien avec leur niveau de revenu, et bénéficient par ailleurs d’une exonération de charges patronales pour les heures d’aide qu’ils rémunèrent.
1.8. Les particuliers-employeurs qui recourent au modèle d’emploi mandataire sont-ils plus souvent des publics fragiles ?
Au quatrième trimestre 2010, sur l’ensemble des particuliers-employeurs de 60 ans ou plus, 15 %, soit un peu plus de 165 000 d’entre eux, passent par une structure mandataire. Ce chiffre est sous-estimé dans la mesure où les données disponibles ne permettent de repérer les particuliers-employeurs qui font le choix du mandataire que parmi ceux qui déclarent leur salarié via une Déclaration nominative simplifiée. Or il est tout à fait probable qu’un certain nombre de particuliers-employeurs qui rémunèrent leur salarié via un Chèque-Emploi-Service-Universel l’aient recruté grâce à une structure mandataire, mais cette information n’est pas disponible dans les bases de l’ACOSS. Néanmoins, cette limite étant précisée, on peut s’intéresser au profil des particuliers-employeurs âgés utilisateurs du modèle mandataire, afin d’identifier si cette utilisation semble corrélée à leur degré de fragilité.
En moyenne, les particuliers-employeurs âgés qui recourent à une structure mandataire sont un peu plus âgés que l’ensemble des particuliers-employeurs de 60 ans ou plus : près de 82 ans pour les premiers, contre 77,8 ans pour les seconds. La comparaison de leurs structures par âge respectives confirme ce constat : ceux qui recourent à une structure mandataire sont systématiquement moins nombreux dans tous les groupes d’âge quinquennaux de 60-64 ans à 75-79 ans, et sont en revanche plus nombreux proportionnellement dans tous les groupes d’âge suivants (graphique 5). En cohérence avec ce qui a été rappelé précédemment, leur âge plus avancé augmente donc leur risque d’être dépendants ou de le devenir prochainement.
Les particuliers-employeurs qui ont recours au mandat sont par ailleurs nettement plus souvent que la moyenne bénéficiaires de l’APA (35 % contre 15 % des particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus), un peu moins souvent bénéficiaires de l’exonération de charges patronales pour les personnes âgées (50 % contre 60 %), plus souvent bénéficiaires d’une autre exonération liée à un handicap (9 % contre 5 %) ; les bénéficiaires de l’exonération de charges pour les 70 ans et plus identifiés comme fragiles dans la partie précédente de l’étude ont en revanche un poids moins important parmi les particuliers-employeurs qui recourent au mandat que dans l’ensemble de la population des particuliers-employeurs âgés (8 % contre 13 %) (tableau 5). Ce phénomène peut peut-être s’expliquer par une incitation des conseils généraux à recourir à une structure mandataire plutôt qu’à l’emploi direct. Les particuliers-employeurs âgés de 70 ans ou plus qui ne recourent pas à l’APA à domicile mais présentent un profil de consommation d’aide comparable à celui des bénéficiaires de l’APA ne subissant pas d’incitation, c’est peut-être par choix financier qu’ils préfèrent être employeurs directs. Enfin, les publics considérés comme non fragiles pèsent trois fois moins que dans la population des particuliers-employeurs âgés totale : 6 % contre 20 %.
En revanche, les particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA qui recourent à une structure mandataire ne se distinguent pas particulièrement des autres. On se serait attendu à trouver parmi eux une plus importante proportion de personnes lourdement dépendantes : mais leur répartition par GIR est sensiblement la même que celle observée dans l’ensemble des particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA (tableau 6).
1.9. les particuliers-employeurs âgés sont durablement engagés dans les relations d’emplois qu’ils créent
La posture idéologique selon laquelle les salariés en emploi direct ne sont pas à même d’accompagner correctement les personnes en perte d’autonomie dans leur quotidien met en cause leurs compétences professionnelles et leur capacité à adopter les bons comportements et la bonne distance en l’absence d’encadrement, par opposition aux intervenants des structures prestataires. Au sein de ces dernières, l’organisation du travail est pensée13L’organisation des tâches est normalement déterminée en amont, en concertation, par la personne âgée et/ou sa famille le cas échéant et le responsable de la structure. L’intervenant reçoit ensuite les consignes de ce dernier et la personne âgée n’est pas dans un rapport hiérarchique avec lui. L’intervenant n’est pas toujours le même afin que la relation de travail ne soit pas trop chargée émotionnellement et pour alléger la charge mentale de l’intervenant lorsque les situations sont difficiles (fin de vie, etc…). pour éviter que les personnes aidées ne s’attachent trop à ceux qui les accompagnent. Mais certains travaux ont montré que les personnes âgées accordent plus d’importance aux qualités relationnelles qu’aux compétences techniques des intervenants qui les accompagnent14Djamel Messaoudi, « Les tensions sur la qualité et les conventions dans l’aide à domicile aux personnes âgées », In Approches institutionnalistes des inégalités en économie sociale. Tome 2 : Politiques, Paris, l’Harmattan, 2007. Son enquête auprès de personnes âgées bénéficiant d’un accompagnement à leur domicile pour les tâches ménagères et /ou pour d’autres actes de la vie quotidienne, pour comprendre comment elles évaluent la qualité de la prestation qu’elles reçoivent, montre que les qualités relationnelles ont une importance considérable pour ces personnes, qui citent « la confiance, le savoir-être et le respect » comme les trois qualités les plus importantes à leurs yeux.. Avant de s’intéresser aux arguments invoqués dans le volet suivant de l’étude consacré à ces intervenants, c’est déjà à travers les comportements des particuliers-employeurs que l’on peut trouver des éléments de réponse à la question de la bonne adéquation entre les attentes des personnes aidées et le travail des intervenants en emploi direct qui les accompagnent15Brigitte Croff et Associés, Une meilleure connaissance des particuliers-employeurs en perte d’autonomie, rapport piloté par l’Observatoire FEPEM, FEPEM-CNSA, mars 2010.. L’étude des relations d’emploi nouées par des personnes âgées de 60 ans ou plus avec des salariés en emploi direct montre que celles-ci sont relativement durables dans le temps, ce qui semble plutôt témoigner d’un choix assumé, d’une satisfaction partagée et peut-être même d’un certain attachement respectif.
Cette analyse n’est possible que pour ceux d’entre eux qui sont utilisateurs du CESU – néanmoins très largement majoritaires – l’ACOSS ne disposant pas des données relatives aux salariés déclarés via une Déclaration nominative simplifiée.
On a sélectionné l’ensemble des particuliers-employeurs âgés de 60 ans ou plus utilisateurs du CESU en 2010 – au nombre de 921 700 – et identifié l’ensemble des relations d’emploi dans lesquelles ils sont impliqués, soit un peu plus de 2,8 millions de relations d’emploi. Ainsi en moyenne, en 2010, chacun d’entre eux aurait été engagé dans trois relations d’emploi différentes. Concrètement, il s’agit d’une analyse de cohorte inversée : au lieu de repérer un stock d’individus à une date T, et de les suivre sur les années qui suivent, on observe leurs comportements de façon rétrospective, sur les années précédentes, en remontant dans le temps (tableau 7).
67 % des relations d’emploi actives en 2010 l’étaient déjà en 2009 ; celles d’entre elles qui étaient déjà actives en 2008 ne représentent plus que 48 %, et cette proportion va en diminuant à mesure qu’on remonte dans le temps. Mais si les relations d’emploi qui sont actives en 2010 et n’ont jamais cessé de fonctionner depuis 2006 ne comptent que pour 26 %, ce sont néanmoins près de 735 000 relations d’emploi entre une personne âgée et un salarié en emploi direct qui n’ont pas cessé de fonctionner pendant cinq années successives ; 425 000 d’entre elles sont en outre actives depuis au moins sept ans (et peut-être davantage mais les données disponibles ne permettent pas de remonter au-delà de 2004).
Quant aux relations d’emploi qui, actives en 2010, n’existaient pas en 2009, on peut penser, comme on l’a déjà montré dans une étude précédente16Sophie Bressé, Durabilité des relations d’emploi entre les particuliers-employeurs utilisateurs du CESU et leurs salariés, Etude réalisée à partir des données de l’ACOSS, Observatoire FEPEM, novembre 2010., qu’elles correspondent pour une large part d’entre elles à des relations d’emploi occasionnelles.
Si on regarde, pour chaque année, la part des relations d’emploi qui, actives une année N, l’étaient déjà l’année précédente, on constate qu’une part importante de relations d’emploi sont pérennes d’une année sur l’autre. 67 % des relations actives en 2010 l’étaient déjà en 2009, et parmi celles-ci 71 % l’étaient en 2008, avec des taux de pérennité par rapport à l’année précédente toujours plus importants quand la relation remonte loin dans le temps. Les relations qui ont passé le cap de la deuxième année ont donc tendance à s’installer de façon encore plus pérenne dans le temps. On s’autorise ainsi à conclure que les relations d’emploi qui durent depuis plusieurs années sont des relations qui donnent satisfaction à leurs protagonistes, et dans le cas des personnes en situation de perte d’autonomie, c’est sans doute le signe qu’elles s’y retrouvent dans le fait d’être accompagnées dans cette période de leur vie par une personne qu’elles ont choisi et qui leur dispense une aide de façon régulière et pérenne.
Cette volonté des personnes âgées de choisir leur intervenant est une hypothèse complexe à approcher par l’analyse quantitative. Cependant, les données dont on dispose permettent de corroborer celle-ci : ainsi parmi les 24 500 particuliers-employeurs qui ont commencé à bénéficier de l’APA au 4ème trimestre 2010, la moitié était déjà particulier-employeur auparavant : 34 % de ces derniers ont conservé le salarié qu’ils employaient déjà auparavant, dans le nouveau cadre de l’APA, et ainsi choisi de prolonger une relation d’emploi, et sans doute une relation humaine.
2. Un métier aux multiples facettes
Cette deuxième partie de l’étude vise à mieux cerner le profil des salariés qui travaillent, en emploi direct et en mode prestataire, au domicile des personnes âgées dépendantes, et plus encore l’appréciation qu’ils portent à leur travail.
Aucune étude ne permettait jusqu’alors de savoir ce qui oppose, dans leur parcours ou dans leur rapport au travail les salariés en emploi direct et les salariés prestataires, ni même si il y a matière à les opposer.
Ce manque de connaissance est en grande partie lié au fait que les enquêtes traditionnellement utilisées pour appréhender les transformations du travail et de l’emploi ne permettent pas d’étudier finement les personnes qui travaillent au domicile des particuliers, que ce soit dans le champ de la dépendance, ou plus globalement dans celui des services à domicile.
Sur le plan qualitatif, les principales recherches menées sur le sujet n’ont pas étudié la question du rôle joué par le mode d’exercice sur les conditions de travail et d’emploi des salariés à domicile. Ces recherches17 Tania Angeloff, « Employées de maison, aides à domicile : un secteur paradoxal », in Florence Weber et alii, (dir.), Charges de famille. Dépendance et parenté dans la France contemporaine, La Découverte, Paris, 2003, pp. 165-186 ; Christelle Avril, « Aide à domicile pour personnes âgées : un emploi-refuge », in Erika Flahault (dir.), L’insertion professionnelle des femmes. Entre contraintes et stratégies d’adaptation, PUR, Rennes, 2006, pp. 207-217. constituent néanmoins le point de départ à partir duquel a été réalisée cette étude.
A partir de l’exploitation d’une enquête statistique nationale « IAD » menée en 2008 par la DREES18Cette enquête porte sur le parcours professionnel et la formation des intervenants, leur activité, les conditions d’exercice du métier et les conditions de travail. Les premiers résultats de cette enquête ont été publiés par Rémy Marquier (cf. bibliographie)., on propose ici une analyse du métier des intervenants au domicile des personnes dépendantes qui questionne la diversité des modalités d’exercice de cette activité. Cette étude interroge plus particulièrement la place et la spécificité de l’emploi direct dans l’activité d’aide au domicile des personnes dépendantes19 Les premiers résultats de ce travail ont été présentés au colloque Care, migrations internationales et genre, le 5 mars 2011, à Tokyo..
2.1. Par qui les besoins d’accompagnement sont-ils couverts ?
En 2009, plus d’un demi-million de salariés interviennent au domicile de personnes dépendantes – essentiellement âgées, plus rarement handicapées – soit deux fois plus que dix ans auparavant (+ 51 %) : c’est la famille professionnelle qui, en France, a créé le plus d’emplois entre 2003 et 2009 (graphique 6), y compris lors de la période de récession20Sabine Bessière et alii, « Les métiers en 2009. Seuls quelques métiers résistent à la dégradation du marché du travail », Dares Analyses, n°069, DARES, octobre 2010.. Cette croissance des effectifs d’aides au domicile des personnes dépendantes s’explique par des facteurs endogènes qui tiennent aux tendances démographiques et sociales et à une structuration de l’offre impulsée par les pouvoirs publics ces dernières années. En outre, on peut faire l’hypothèse que la destruction massive d’emplois depuis le début de la crise (entre 450 et 550 000 emplois marchands selon le Centre d’analyse stratégique21Maxime Liégey, Cécile Joly, « Les secteurs créateurs d’emplois à court-moyen terme après la crise », La Note d’analyse, n° 200, Centre d’analyse stratégique, novembre 2010.) a poussé un certain nombre de personnes occupées dans les secteurs les plus sensibles à la conjoncture à s’orienter vers les activités d’aide à la personne.
En France, ce sont massivement des femmes, plus âgées, plus souvent d’origine étrangère et moins diplômées que la moyenne de la population en emploi, qui interviennent au domicile des personnes dépendantes (tableau 8). Pour autant, ces grandes caractéristiques recouvrent, comme le montre l’enquête IAD, des conditions d’exercice du métier très différentes. Ainsi, sur les 515 000 professionnelles22La quasi-totalité des salariés observés dans l’enquête étant des femmes, on utilisera le féminin pour parler, dans cette partie de l’étude, des intervenantes à domicile. qui interviennent au domicile des personnes fragilisées (âgées et handicapées), près des deux tiers (63 %) sont salariées d’un particulier-employeur : 23,5 % travaillent exclusivement en emploi direct et 39,5 % travaillent en mode mandataire ou en mode mixte (selon au moins deux des modes d’exercice suivants : emploi direct, emploi mandataire ou emploi prestataire). L’emploi prestataire exclusif occupe 37 % des salariées qui interviennent au domicile des personnes fragilisées23Rémy Marquier, « Les intervenantes au domicile des personnes fragilisées en 2008 », Études et Résultats, n° 728, DREES, juin 2010..
2.2. Une entrée tardive dans l’activité
Selon l’enquête IAD, dans la majorité des cas, les intervenantes au domicile des personnes dépendantes n’ont pas suivi de formation initiale en lien avec ce métier : 62 % n’ont aucun diplôme du secteur sanitaire et social, avec une différence nette entre les salariées en emploi direct qui sont 85 % dans ce cas, et les salariées prestataires (48 %).
Elles ont accédé à ces emplois relativement tardivement (35,7 ans en moyenne), encore plus tardivement lorsqu’elles interviennent en emploi direct (38,3 ans en moyenne, contre 33,9 ans pour les salariées prestataires).
88 % des intervenantes à domicile ont exercé un autre métier avant (depuis la fin de leurs études ou de leur formation initiale), dans des secteurs traditionnellement féminins comme le commerce (37 % d’entre elles) mais aussi dans l’industrie (25 %). L’enquête ne donne pas davantage d’indications sur la nature précise de ces emplois, mais elle renseigne sur le fait qu’ils n’avaient pas de rapport avec l’aide ou l’accompagnement de personnes ou de familles en difficulté dans 84 % des cas.
En outre, 68 % des intervenantes ont connu une ou plusieurs périodes d’inactivité ou de chômage avant de travailler au domicile des personnes dépendantes. Ces résultats corroborent ceux des enquêtes de terrain menées sur le sujet qui montrent que ces emplois sont souvent une voie de réinsertion dans l’emploi pour des femmes qui connaissent un déclassement professionnel ou qui ne parviennent pas à se stabiliser sur le marché du travail24 « Malgré leur position vulnérable sur le marché du travail, elles trouvent là une voie privilégiée d’insertion qui tient à une raison essentielle : elles ne sont pas en concurrence avec les hommes sur ce type d’emploi associé à un rôle féminin dans la division sexuelle du travail » : Avril, op. cit..
Accompagner les personnes âgées dépendantes à leur domicile n’est donc pas un métier choisi en tout début de vie active25Du moins dans l’économie formelle. Des recherches menées sur d’autres emplois à domicile – ceux de femmes de ménage au domicile de personnes non dépendantes – ont montré que pour les femmes d’origine étrangère dépourvues d’autorisation de travail, ce type d’emplois est la voie d’accès au marché du travail privilégiée. L’accès aux emplois d’accompagnement au domicile des personnes dépendantes se fait-il aussi facilement pour cette frange de la population féminine ?. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant qu’une grande partie des intervenantes déclarent être entrées dans ce métier « par hasard, par opportunité » ou « pour l’argent » (tableau 9).
L’enquête ne permet pas de savoir si les contraintes financières citées plus souvent par les salariées en emploi direct que par les salariées prestataires sont liées à leur situation familiale et professionnelle au moment de l’entrée dans l’activité d’aide au domicile des personnes dépendantes26La situation familiale décrite par les salariés est celle de 2008, et non pas celle qui était la leur au moment de leur entrée dans l’activité d’aide à domicile. Or ils déclarent une ancienneté moyenne relativement élevée (plus de 9 ans). Leur situation a donc pu évoluer depuis. L’enquête ne renseigne pas non plus sur la situation dans l’emploi au moment de l’entrée dans l’activité..
Néanmoins, on peut faire l’hypothèse que le moindre attrait déclaré par les salariées en emploi direct fait écho à un parcours professionnel antérieur plus éloigné des emplois d’aide à la personne (par exemple, elles sont plus nombreuses, relativement aux intervenantes prestataires, à avoir travaillé dans le secteur industriel – 26 % contre 20 %) et à un parcours sans doute plus chaotique du fait notamment de leur profil qui les rend plus vulnérables sur le marché du travail (tableau 10) : moins formées, elles sont aussi plus âgées en moyenne (47,4 ans au moment de l’enquête pour les salariées en emploi direct contre 43,2 ans pour les salariées prestataires) et plus souvent de nationalité étrangère (16 % des salariées en emploi direct déclarent être nées à l’étranger contre 12 % des salariées prestataires). C’est deux fois plus que la part des immigrés dans la population en emploi en France (8 %)27Résultat issu de Bessière op. cit..
2.3. Une perception du travail relativement positive
Si les activités domestiques sont le quotidien de travail de la plupart des intervenantes au domicile des personnes âgées dépendantes, l’accompagnement aux actes essentiels de la vie quotidienne28Activities of Daily Living (ADL) : aide à l’habillage, aide pour aller aux toilettes, aide pour faire la toilette et assurer l’hygiène, aide à la prise des repas, aide aux déplacements dans le logement, aide au coucher ou au lever du lit. est plus présent dans l’activité des salariées prestataires que dans celle des salariées en emploi direct (respectivement 34 % de leur activité contre 22 %), ce qui peut s’expliquer en partie par le niveau de diplôme : « Les intervenantes disposant d’un diplôme, titre professionnel ou certificat de qualification en relation directe avec le métier d’aide à domicile sont clairement celles qui effectuent le plus et le plus souvent d’actes essentiels de la vie quotidienne (…). Toutes choses égales par ailleurs, détenir un de ces diplômes ou titres professionnels relevant des métiers de l’aide à domicile augmente d’entre 3 et 5 points la part d’aide aux actes essentiels par rapport aux personnes n’ayant aucun diplôme du secteur sanitaire et social29 Rémy Marquier, « Les activités des aides à domicile en 2008 », Études et Résultats, n° 741, DREES, octobre 2010. ».
Pour autant, l’importance des activités domestiques dans le travail des intervenantes en emploi direct ne doit pas occulter le fait qu’elles accompagnent, elles aussi, des personnes lourdement dépendantes. Bien que ces situations concernent relativement plus les salariées prestataires, 59 % des salariées en emploi direct déclarent être amenées à aider des personnes atteintes de détérioration physique (maladies, handicap, incontinence, etc.), 35 peuvent être amenées à travailler auprès de personnes atteintes de détérioration intellectuelle/mentale (désorientées, maladie d’Alzheimer…) et près de 25 % disent aider des personnes en fin de vie.
En outre, on peut souligner le fait que l’importance du poids du travail de ménage dans l’activité des salariées qui interviennent, en emploi direct, au domicile des personnes dépendantes, ne semble pas être, pour elles, synonyme de dévalorisation sociale.
Parmi les aspects négatifs du métier, les salariées en emploi direct ne sont que 19 % à citer le fait qu’elles ne le trouvent pas valorisé par la société et par leur entourage, contre 29 % des salariées prestataires (tableau 11). On sait en effet, que le travail de ménage n’est pas « que du ménage », surtout quand il est accompli au domicile des personnes âgées. À la logique contractuelle, se mêle souvent une logique relationnelle particulièrement forte dans les relations qui lient les professionnelles aux personnes dépendantes30Vincent Caradec, « L’aide ménagère : une employée ou une amie ? », in Jean-Claude Kaufmann (dir.), Faire ou faire-faire ? Famille et services, Rennes, PUR, 1995, pp. 155-168. On se reportera aussi à l’excellent roman biographique d’Anton Valens, Homme de ménage, Paris, Actes Sud, 2010..
On se doit aussi de préciser ici le fait que la perception que se font les salariés de leur travail, ne dépend pas uniquement de la réalité concrète de celui-ci. Le discours porté sur le travail est une construction sociale qui dépend fortement de la plus ou moins grande capacité des salariés à objectiver leurs conditions de travail. Tout un ensemble de processus sociaux amène les individus à verbaliser le travail, à en détacher des particularités traduisibles par des mots31Michel Gollac, Serge Volkoff, Les conditions de travail, Paris, La Découverte, 2e édition, 2007.. Ainsi, l’échange d’expériences singulières entre collègues par exemple, peut contribuer à faire émerger des représentations du travail, qui seront différentes de celles portées par des salariés moins insérés dans un collectif de travail, et qui pourront, de fait, être sensibilisés différemment aux problématiques de formation professionnelle, de prévention des risques professionnels, etc.
2.4. Des pénibilités physiques importantes
Intervenir auprès de personnes dépendantes est une activité physiquement pénible, synonyme souvent de contraintes posturales fortes et d’efforts physiques importants (tableau 12). Ici aussi, les différences observées entre les déclarations des salariées en emploi direct et celles des salariées prestataires peuvent s’expliquer par les représentations que chacun se fait du métier, mais aussi par la nature du travail effectué et donc par un « effet d’exigence » qui peut varier selon la structure, la personne aidée, la famille, etc.
On peut faire l’hypothèse que la capacité des salariées en emploi direct à choisir les personnes auprès desquelles elles interviennent, permet probablement de soulager en partie la charge physique de travail. Dans l’enquête IAD, les salariées en emploi direct mettent un peu plus souvent en avant que les salariés prestataires, l’autonomie plus grande dont elles disposent vis-à-vis du particulier-employeur, ce qui contribue certainement à positiver, dans une certaine mesure, leur rapport au travail.
Le quart des salariées qui interviennent exclusivement en emploi direct au domicile des personnes dépendantes citent, parmi les aspects positifs de leur travail, le fait d’être plutôt libres (autonomes), moins dépendantes de leur employeur qu’ailleurs, le fait d’organiser elles-mêmes leur travail (contre 18% des salariées en mode exclusivement prestataire). Cela corrobore les résultats d’autres enquêtes qui montrent que les salariées en emploi direct qui disposent le plus de ressources (de réseau notamment) ont souvent plus de marge de manoeuvre pour choisir les personnes chez lesquelles elles vont intervenir (en fonction de leur niveau de dépendance par exemple, de leur niveau d’exigence, du niveau de rémunération négociable, de la distance entre le domicile de la personne aidée et celui de la professionnelle)32Delphine Clozel, « Analyse qualitative des risques professionnels, des conditions de travail et de l’état de santé des salariés de l’aide et du soin à domicile pour soumettre plusieurs méthodes d’approche à investiguer », Mémoire de l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, septembre 2008 ; Isabelle Puech, « L’emploi des femmes dans les services à domicile. Quelle croissance, quelle qualité, quelles politiques ? Une comparaison France-Belgique des femmes de ménage travaillant chez des particuliers », Rapport de recherche, DULBEA, Université libre de Bruxelles, janvier 2007. et pour gérer de façon relativement souple leurs horaires, que si elles travaillaient pour un organisme prestataire ou une entreprise dans un autre secteur.
2.5. Contraintes temporelles et charge psychologique
Au-delà de la charge physique de travail, l’accompagnement à domicile des personnes dépendantes représente aussi une charge psychologique lourde liée à l’exécution même des tâches et aux contraintes de temps auxquelles les salariées sont confrontées.
Le temps partiel des salariées à domicile est souvent mis en avant comme un facteur important de précarisation de leur emploi. On voit dans l’enquête IAD que seulement 16,9 % des salariées en emploi direct travaillent au domicile des personnes dépendantes à temps complet, contre 37 % des salariées des structures prestataires (tableau 13).
Pour autant, la pression temporelle du travail semble s’exercer de façon particulièrement forte sur les salariées prestataires dont le travail repose sur un nombre d’interventions relativement élevé – 8,3 en moyenne au cours de la semaine contre 3,1 pour les salariées en emploi direct – avec comme corollaire des temps de déplacement nombreux et potentiellement longs, des temps d’intervention par personne aidée relativement courts (4,4 heures hebdomadaires, contre 10,7 heures pour les salariées en emploi direct), de plus en plus souvent chronométrés (pointeuse par système de télégestion), ce qui est souvent synonyme de charge psychologique supplémentaire pour ces salariées (tableau 14).
Au final, les salariées des structures prestataires ont, dans cette activité, des temps de travail hebdomadaires relativement plus longs que les salariées en emploi direct, mais au prix d’une plus grande flexibilité. Pour une structure prestataire, assurer une continuité de service, cela signifie faire travailler ses salariées les jours fériés et le week-end, palier les remplacements et les arrêts maladies en faisant appel aux heures supplémentaires, pratiquer des horaires pas toujours réguliers d’une semaine sur l’autre.
D’après l’enquête IAD, ces contraintes horaires se traduisent, plus souvent pour les salariées prestataires que pour les salariées en emploi direct, par une pression temporelle forte : sentiment de devoir travailler très vite (cité par 53 % des salariées prestataires, contre 31 % des salariées en emploi direct), travailler intensément (63 % contre 43 %), effectuer une quantité de travail excessive (37 % contre 14 %), ne pas disposer du temps nécessaire pour exécuter correctement son travail (37 % contre 14 %).
En outre, la question de la mesure du temps de travail des salariées à domicile n’est pertinente que si on la relie à celle du modèle d’organisation de l’activité qui repose, pour une grande partie de ces salariées, sur la multi-activité, c’est-à-dire sur le fait de travailler pour plusieurs employeurs, dans le même secteur ou dans un autre. L’INSEE estime que près de la moitié des salariés du particulier-employeur (toutes catégories d’emplois confondues) occupent aussi un autre emploi qui relève, ou pas, du même statut professionnel. Pour le tiers de ces salariés, l’activité chez le particulier-employeur n’est pas leur emploi principal, mais une source secondaire de revenu33C. Marbot, « Travailler pour un particulier-employeur : souvent une activité d’appoint », INSEE, Les salaires en France, Edition 2008, pp. 27-41..
L’accompagnement des personnes dépendantes représente plus souvent l’activité principale des salariées en emploi direct, mais une forte part de multi-activité demeure puisque pour le quart des intervenantes en emploi direct, ce n’est pas l’activité principale (contre 8 % des salariées prestataires). On peut imaginer qu’une partie des salariées en emploi direct, relativement âgées on l’a vu, travaillent pour compléter leur retraite. Pour celles qui sont encore en activité, elles effectuent exclusivement du ménage dans leurs autres emplois (dans le secteur industriel, les écoles, les hôpitaux, etc.).
2.6. Un emploi durable
Malgré l’arrivée tardive dans cette activité et des pénibilités qui lui sont associées, les salariées qui interviennent au domicile des personnes dépendantes n’envisagent pas de changer de métier dans les années qui viennent (80 %) et ce, quel que soit leur mode d’intervention. Les trois quart envisagent de faire ce métier jusqu’à l’âge de la retraite.
Pour autant, la majorité d’entre elles souhaitent évoluer dans leur métier en suivant une formation34Six intervenants à domicile sur dix envisagent de suivre prochainement une formation., d’autant plus lorsqu’elles travaillent pour une structure prestataire : les trois quarts souhaitent être davantage formées, contre 40 % des salariées en emploi direct.
On voit ici toute l’importance des efforts de professionnalisation portés par les acteurs de la branche Salariés du particulier-employeur : efforts en termes de mise en œuvre de dispositifs de formation, mais aussi nécessité d’informer, de reconnaître l’activité des salariés du particulier-employeur comme une activité à part entière qui repose sur des compétences et qui permet aussi le développement de celles-ci35Selon l’enquête IAD, seulement 38 % des salariées en emploi direct trouvent que leur travail demande un haut niveau de compétences et 60 % disent avoir l’occasion de développer leurs compétences professionnelles (contre respectivement 64 % et 86 % des salariées prestataires)..
Bibliographie
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- 1Nathalie Blanpain, Olivier Chardon, « Projections de population à l’horizon 2060. Un tiers de la population âgé de plus de 60 ans », Insee Première, n° 1320, INSEE, octobre 2010.
- 2Séverine Dos Santos, Yara Makdessi, « Une approche de l’autonomie chez les adultes et les personnes âgées. Premiers résultats de l’enquête Handicap-Santé 2008 », Études et Résultats, n° 715, DREES, février 2010.
- 3Les services à domicile peuvent être délivrés selon trois modes d’intervention : l’emploi direct où le particulier gère lui-même l’ensemble de la relation d’emploi (du recrutement à la séparation) ; le mandat dans le cadre duquel le particulier conclut un contrat de mandat avec une structure mandataire qui l’aide à trouver et recruter un salarié et à gérer les tâches administratives inhérentes à la relation d’emploi ; le mode prestataire dans le cadre duquel la structure prestataire est l’employeur du salarié qui fournit une prestation au particulier. En emploi direct et en mode mandataire, le particulier est juridiquement l’employeur du salarié qui intervient à son domicile, d’où son statut de particulier-employeur.
- 4Matthieu Angotti, « Emploi familial : le vécu des particuliers-employeurs », Consommation et Modes de vie, n° 213, CREDOC, août 2008.
- 5Observatoire FEPEM, Rapport de branche Salariés du particulier-employeur – 2009, FEPEM, avril 2011.
- 6FEPEM, La réforme de la dépendance. Une opportunité sociétale et économique. Propositions contributives de la FEPEM, juin 2011.
- 7Pour être tout à fait exact, ces particuliers-employeurs peuvent employer une baby-sitter de façon plus ou moins occasionnelle, déclarée via un CESU (Chèque Emploi Service Universel) ou une DNS (Déclaration Nominative Simplifiée), une activité assimilable à de la garde d’enfant mais non subventionnée par la PAJE (Prestation d’Accueil du Jeune Enfant).
- 8L’enquête Handicap-Santé en ménages ordinaires (HSM) menée conjointement par la DREES et l’INSEE en 2008 permet de disposer de données sur la prévalence de la dépendance aux différents âges pour l’ensemble de la population, alors que la plupart des données existantes sur le phénomène portent sur un champ limité.
- 9Dos Santos, Makdessi, op. cit.
- 10Guillaume Bailleau, Françoise Trespeux, « Les bénéficiaires de l’aide sociale départementale en 2009 », Études et Résultats, n° 742, DREES, octobre 2010.
- 11Pour faire ce constat, on reprend l’association volume horaire/GIR qui a servi pour l’imputation des GIR aux particuliers-employeurs bénéficiaires de l’APA : on considère que ceux dont le volume horaire rémunéré sur le trimestre observé est compris entre les volumes horaires seuils retenus pour effectuer l’imputation des GIR pourraient potentiellement être éligibles à l’APA et classés dans ces GIR.
- 12« Enquête trimestrielle menée par la DREES auprès des conseils généraux sur l’Allocation personnalisée d’autonomie, Statistiques au 4ème trimestre 2010 », APA Résultats de l’enquête trimestrielle, DREES, mars 2011.
- 13L’organisation des tâches est normalement déterminée en amont, en concertation, par la personne âgée et/ou sa famille le cas échéant et le responsable de la structure. L’intervenant reçoit ensuite les consignes de ce dernier et la personne âgée n’est pas dans un rapport hiérarchique avec lui. L’intervenant n’est pas toujours le même afin que la relation de travail ne soit pas trop chargée émotionnellement et pour alléger la charge mentale de l’intervenant lorsque les situations sont difficiles (fin de vie, etc…).
- 14Djamel Messaoudi, « Les tensions sur la qualité et les conventions dans l’aide à domicile aux personnes âgées », In Approches institutionnalistes des inégalités en économie sociale. Tome 2 : Politiques, Paris, l’Harmattan, 2007. Son enquête auprès de personnes âgées bénéficiant d’un accompagnement à leur domicile pour les tâches ménagères et /ou pour d’autres actes de la vie quotidienne, pour comprendre comment elles évaluent la qualité de la prestation qu’elles reçoivent, montre que les qualités relationnelles ont une importance considérable pour ces personnes, qui citent « la confiance, le savoir-être et le respect » comme les trois qualités les plus importantes à leurs yeux.
- 15Brigitte Croff et Associés, Une meilleure connaissance des particuliers-employeurs en perte d’autonomie, rapport piloté par l’Observatoire FEPEM, FEPEM-CNSA, mars 2010.
- 16Sophie Bressé, Durabilité des relations d’emploi entre les particuliers-employeurs utilisateurs du CESU et leurs salariés, Etude réalisée à partir des données de l’ACOSS, Observatoire FEPEM, novembre 2010.
- 17Tania Angeloff, « Employées de maison, aides à domicile : un secteur paradoxal », in Florence Weber et alii, (dir.), Charges de famille. Dépendance et parenté dans la France contemporaine, La Découverte, Paris, 2003, pp. 165-186 ; Christelle Avril, « Aide à domicile pour personnes âgées : un emploi-refuge », in Erika Flahault (dir.), L’insertion professionnelle des femmes. Entre contraintes et stratégies d’adaptation, PUR, Rennes, 2006, pp. 207-217.
- 18Cette enquête porte sur le parcours professionnel et la formation des intervenants, leur activité, les conditions d’exercice du métier et les conditions de travail. Les premiers résultats de cette enquête ont été publiés par Rémy Marquier (cf. bibliographie).
- 19Les premiers résultats de ce travail ont été présentés au colloque Care, migrations internationales et genre, le 5 mars 2011, à Tokyo.
- 20Sabine Bessière et alii, « Les métiers en 2009. Seuls quelques métiers résistent à la dégradation du marché du travail », Dares Analyses, n°069, DARES, octobre 2010.
- 21Maxime Liégey, Cécile Joly, « Les secteurs créateurs d’emplois à court-moyen terme après la crise », La Note d’analyse, n° 200, Centre d’analyse stratégique, novembre 2010.
- 22La quasi-totalité des salariés observés dans l’enquête étant des femmes, on utilisera le féminin pour parler, dans cette partie de l’étude, des intervenantes à domicile.
- 23Rémy Marquier, « Les intervenantes au domicile des personnes fragilisées en 2008 », Études et Résultats, n° 728, DREES, juin 2010.
- 24« Malgré leur position vulnérable sur le marché du travail, elles trouvent là une voie privilégiée d’insertion qui tient à une raison essentielle : elles ne sont pas en concurrence avec les hommes sur ce type d’emploi associé à un rôle féminin dans la division sexuelle du travail » : Avril, op. cit.
- 25Du moins dans l’économie formelle. Des recherches menées sur d’autres emplois à domicile – ceux de femmes de ménage au domicile de personnes non dépendantes – ont montré que pour les femmes d’origine étrangère dépourvues d’autorisation de travail, ce type d’emplois est la voie d’accès au marché du travail privilégiée. L’accès aux emplois d’accompagnement au domicile des personnes dépendantes se fait-il aussi facilement pour cette frange de la population féminine ?
- 26La situation familiale décrite par les salariés est celle de 2008, et non pas celle qui était la leur au moment de leur entrée dans l’activité d’aide à domicile. Or ils déclarent une ancienneté moyenne relativement élevée (plus de 9 ans). Leur situation a donc pu évoluer depuis. L’enquête ne renseigne pas non plus sur la situation dans l’emploi au moment de l’entrée dans l’activité.
- 27Résultat issu de Bessière op. cit.
- 28Activities of Daily Living (ADL) : aide à l’habillage, aide pour aller aux toilettes, aide pour faire la toilette et assurer l’hygiène, aide à la prise des repas, aide aux déplacements dans le logement, aide au coucher ou au lever du lit.
- 29Rémy Marquier, « Les activités des aides à domicile en 2008 », Études et Résultats, n° 741, DREES, octobre 2010.
- 30Vincent Caradec, « L’aide ménagère : une employée ou une amie ? », in Jean-Claude Kaufmann (dir.), Faire ou faire-faire ? Famille et services, Rennes, PUR, 1995, pp. 155-168. On se reportera aussi à l’excellent roman biographique d’Anton Valens, Homme de ménage, Paris, Actes Sud, 2010.
- 31Michel Gollac, Serge Volkoff, Les conditions de travail, Paris, La Découverte, 2e édition, 2007.
- 32Delphine Clozel, « Analyse qualitative des risques professionnels, des conditions de travail et de l’état de santé des salariés de l’aide et du soin à domicile pour soumettre plusieurs méthodes d’approche à investiguer », Mémoire de l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, septembre 2008 ; Isabelle Puech, « L’emploi des femmes dans les services à domicile. Quelle croissance, quelle qualité, quelles politiques ? Une comparaison France-Belgique des femmes de ménage travaillant chez des particuliers », Rapport de recherche, DULBEA, Université libre de Bruxelles, janvier 2007.
- 33C. Marbot, « Travailler pour un particulier-employeur : souvent une activité d’appoint », INSEE, Les salaires en France, Edition 2008, pp. 27-41.
- 34Six intervenants à domicile sur dix envisagent de suivre prochainement une formation.
- 35Selon l’enquête IAD, seulement 38 % des salariées en emploi direct trouvent que leur travail demande un haut niveau de compétences et 60 % disent avoir l’occasion de développer leurs compétences professionnelles (contre respectivement 64 % et 86 % des salariées prestataires).